Toute entreprise qui connaît le succès et souhaite étendre son implantation géographique afin de multiplier ses débouchés, est amenée à s’interroger un jour ou l’autre sur l’opportunité de créer son propre réseau.
Dans cette optique, l’entreprise concernée pourra envisager d’organiser son développement de multiples façons :
Elle pourra notamment opter pour l’ouverture de boutiques ou points de vente « en propre » (c’est à dire sous forme de sociétés succursales), solution qui permet une expansion intégrée mais au prix de lourds investissements.
Elle pourra également avoir recours à des partenaires indépendants affiliés, chacun de ces partenaires se chargeant soit de la représenter et de vendre pour son compte (telle est la mission des agents commerciaux), soit de distribuer ses produits (c’est à dire de les acheter pour ensuite les revendre) dans une zone territoriale déterminée.
Parmi les différentes solutions qui consistent à faire distribuer les produits par des indépendants, la franchise constitue l’une des organisations contractuelles les plus plébiscitées par les entrepreneurs français et connaît un succès sans cesse grandissant.
Ce succès est particulièrement important chez les jeunes structures qui trouvent souvent dans la franchise un modèle facilitant les implantations rapides de commerces affiliés et ce pour un coût assez limité.
D’ailleurs, dans l’hexagone, beaucoup de groupements d’indépendants (notamment dans le secteur de l’habillement, de la restauration et de l’immobilier) fonctionnent sur la base de contrats de franchise.
Les exemples de réussite en ce domaine sont nombreux et l’on peut citer, pour illustrer cette réalité, les enseignes ALAIN AFFLELOU et LA BRIOCHE DOREE.
Toutefois, bien que particulièrement appréciée au point de s’offrir annuellement un salon national dédié, la franchise reste, sur certains aspects, mal connue et est fréquemment confondue avec d’autres contrats comme la concession, très courante dans le secteur de la distribution automobile.
Par ailleurs, si elle est un système de distribution efficace et facilement exportable, l’organisation en franchise suppose néanmoins, pour fonctionner, que le réseau repose sur des bases contractuelles solides et que le choix des franchisés se fasse de façon très rigoureuse.
Les caractéristiques essentielles de la franchise
Définition
La franchise est un mode d’organisation contractuelle qui ne fait l’objet d’aucun texte de loi spécifique et reste soumis au droit commun des contrats.
Au regard de la jurisprudence, la franchise peut néanmoins être définie comme l’accord par lequel un opérateur appelé franchiseur concède – le plus souvent dans une zone géographique exclusive – à un commerçant indépendant appelé franchisé, le droit et le devoir d’utiliser son savoir-faire et sa marque ou enseigne et lui offre une assistance technique ou commerciale*.
Ce commerçant doit en contrepartie payer des redevances au franchiseur, parfois un droit d’entrée, et respecter la discipline du réseau (obligation d’achat exclusif d’assortiments de produits auprès du franchiseur ou auprès de fournisseurs référencés ; obligation de respecter la politique promotionnelle du réseau …).
En France, les franchises dites de distribution – c’est à dire celles dans lesquelles le réseau à pour objet de permettre la commercialisation des produits du franchiseur – sont les plus nombreuses.
Dans ce type d’organisation, le franchiseur est soit le fabricant des biens dont il demande à ses franchisés d’assurer la vente, soit plus fréquemment, un diffuseur qui recherche et sélectionne des produits pour ensuite les faire écouler dans le commerce via son réseau de franchisés.
A titre d’illustration, l’on peut citer les réseaux YVES ROCHER et ROCHE BOBOIS.
A côté des franchises de distribution, l’on rencontre également des franchises dont le dessein est la réalisation par les franchisés, de services mis au point grâce au savoir-faire du franchiseur (exemples : MAC DONALD’S ou CENTURY 21).
Franchise et contrats voisins
L’entrepreneur désireux de créer un réseau de franchise doit préalablement s’assurer de ce que ce modèle correspond à ses objectifs et à son activité.
Cette analyse est particulièrement importante car la franchise est régulièrement confondue avec des systèmes contractuels proches.
Tel est notamment le cas du contrat de concession exclusive que l’on définit comme celui par lequel un commerçant, appelé concessionnaire, met son entreprise au service d’un commerçant ou industriel appelé concédant pour assurer exclusivement, sur un territoire déterminé, pendant une période limitée, et sous la surveillance du concédant, la distribution des produits dont le monopole de revente lui est concédé.
Ce contrat (très usuel dans le secteur de la distribution automobile) est proche de la franchise mais s’en distingue en ce qu’il n’induit pas la transmission d’un savoir faire au profit de l’affilié.
Un autre contrat, pourtant très différent de la franchise, est parfois confondu avec cette dernière. Il s’agit du contrat dit de « commission-affiliation » par lequel la tête de réseau met en dépôt ses produits chez un commerçant affilié, à charge pour ce dernier d’en assurer la commercialisation à un prix fixé**. Le commissionnaire affilié n’est pas propriétaire de la marchandise de sorte qu’il n’assume pas les risques d’invendus et est rémunéré à la commission sur les ventes.
Enfin, le commissionnaire affilié doit se soumettre à une discipline de réseau et bénéficie du droit d’utiliser la marque de la tête de réseau.
Il est à noter que de nombreuses enseignes reposent sur des organisations hybrides dans lesquelles coexistent des points de vente en franchise et des points de vente tenus par des commissionnaires affiliés voire par des salariés.
Les étapes à respecter pour créer son réseau
La construction d’un réseau suppose le respect, par le futur franchiseur, de plusieurs étapes clefs.
Avant de vous lancer, vous devrez notamment :
1. Disposer d’une marque et d’un savoir-faire
Ainsi qu’indiqué précédemment, la création d’un réseau de franchise suppose tout d’abord que le futur franchiseur détienne un savoir-faire original et secret.
Ce savoir-faire doit apporter à l’affilié un avantage concurrentiel et peut notamment avoir un caractère commercial (lorsqu’il s’appuie sur des méthodes de vente particulières*) et/ou technique (lorsqu’il implique par exemple l’utilisation de logiciels spécifiques au réseau**) .
Il doit par ailleurs être éprouvé et avoir fait la preuve de son efficience dans le cadre d’une exploitation antérieure.
En pratique, il prend fréquemment la forme d’une « bible » dans laquelle le franchiseur compile les éléments substantiels de sa réussite.
La marque est l’autre élément indispensable dont doit disposer tout futur franchiseur pour la construction de son réseau, cette marque devant être mise à disposition des franchisés***. Elle est essentielle en ce qu’elle fédère les affiliés, permet l’identification de ces derniers et revêt une dimension affective très forte dans l’esprit des consommateurs.
2. Evaluer les chances de succès du réseau
Ce n’est qu’une fois la marque et le savoir-faire réunis et éprouvés que l’édification du réseau pourra véritablement débuter.
L’évaluation de l’efficacité du savoir-faire et des chances de succès du futur réseau se fera le plus souvent par l’ouverture d’un ou plusieurs magasins tests dits « unités pilotes ».
3. Mettre en place l’organisation contractuelle du réseau
Une fois les étapes précédentes accomplies, le futur franchiseur devra ensuite passer à la rédaction des instruments juridiques d’organisation de son réseau. Ces instruments sont principalement :
Le contrat de franchise lui-même, dont le dessein est de régir les relations franchiseur/franchisé et leurs obligations respectives.
Le document d’information précontractuelle (couramment appelé D.I.P) qui a pour objet d’informer le franchisé sur le réseau avant qu’il ne l’intègre. Ce document est obligatoire lorsque le contrat impose une obligation d’exclusivité (le plus souvent d’approvisionnement) à la charge du franchisé.
Les autres contrats permettant le fonctionnement du réseau (contrat de référencement des fournisseurs, conditions générales de vente …).
L’organisation du cadre contractuel est cruciale, car un réseau construit sur de mauvaises bases juridiques pourra rapidement sombrer, et ce même si le concept commercial sur lequel il repose est excellent.
4. Recruter les franchisés
Ces démarches accomplies, le franchiseur pourra alors passer au recrutement des futurs franchisés en se faisant aider, le cas échéant, par une entreprise spécialisée.
Comme les autres, cette étape est fondamentale dans la mesure où une sélection trop rapide et peu rigoureuse des affiliés peut mener à de graves difficultés et à des échecs individuels parfois lourds de conséquences pour l’ensemble du réseau.
*Cour d’appel de Versailles, 4 juillet 1996
**Cour de cassation 1er juillet 2003, SECTA « AUTOSUR » /CTM
***Tribunal de commerce de Paris 7 mars 1995 Sté CJ 62 c/ Sté KOOKAI
Traverser les frontières avec la franchise
L’un des avantages du contrat de franchise est qu’il est connu et utilisé dans un grand nombre de pays.
Même si ses fortunes sont diverses selon les états, il reste globalement attractif de sorte qu’il est aisé pour un franchiseur français de sortir du cadre national pour implanter des franchises à l’étranger, sur des bases contractuelles proches de celles du contrat d’origine.